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La Gestion de l’avant agression : interview de Laurent Patin

Laurent, pourquoi avoir tourné tes recherches vers la Gestion de l’avant agression (GePA) ?

C’est une question d’objectif. Quand j’enseignais les arts martiaux, mon rôle était de transmettre une somme de techniques et une forme de corps propre à la discipline. Pareillement, un prof de boxe enseigne à combattre dans son style, un moniteur de tennis à gagner un match, etc. Je me suis posé la salutaire question de base : « Quel est mon rôle en tant qu’instructeur dit de défense personnelle ? ».

A l’ADAC, l’objectif est bien plus vaste et la technique est un moyen et non une fin comme dans beaucoup d’écoles. Après de nombreuses lectures, réflexions et formations auprès d’Eric Quequet, Robert Paturel et Philippe Perotti (au passage, trois formateurs absolument essentiels pour qui veut se former en défense personnelle et que je recommande par dessus tout), la nécessité a fait sens…

Travailler à éviter un conflit est pour sûr la manière la plus intelligente d’atteindre et faire atteindre son objectif : rester en vie, et dans la meilleure des vies possibles !

Quels savoir-faire pour gérer le premier contact ?

Il est ici question non seulement d’une somme de savoir-faire (démontrés dans le stage), mais aussi de savoir (connaissance des types d’agression, de la violence…) et de savoir-être (ce que l’on dégage). Le gros du travail est à faire en amont de la « baston » et la vigilance sert la communication.

Comment savoir si on a affaire à un agresseur… ou pas ?

Question très difficile… Quoiqu’il en soit, et comme en situation la réflexion est un luxe, la réponse dans un premier temps se doit d’être générique. Beaucoup d’agresseurs organisés ou opportunistes fonctionnent avec une phase de « test ». S’ils ont en face une cible jugée « molle », ça leur donne du baume au cœur ! L’incertitude de l’agression, beaucoup travaillée par les formateurs de l’ADAC, est ici amoindrie par une réponse standard.

Peut-on distinguer plusieurs phases ?

Oui. Mais pour simplifier, en stage, je m’en tiens à deux : une phase où on est « cool » et la suivante où on l’est moins… Sachant qu’on a le même objectif : je veux ne pas me battre, je suis assez adulte et mûr pour en connaître les conséquences à très court et moyen terme !

Comment savoir quand parler, fuir, se défendre physiquement ?

Dans le module GePA (Gestion de l’Avant agression) de l’ADAC j’ai axé l’étude sur 5 piliers complémentaires, 5 axes de travail simultanés qui s’appuient les uns sur les autres. La réponse à l’enchaînement des phases de l’agression se fait de manière plus fluide et générique. Encore une fois la réflexion, la pensée logique construite est, sous stress, un luxe que peu peuvent s’offrir.

Comment gérer la fuite ?

Lors de mon tout premier stage d’été ADAC en 2005 Eric Quequet nous apprenait dans un lugubre parking sous-terrain la manière correcte de fuir face à une sortie de couteau, étayée d’expériences de terrain qui reportaient les erreurs habituelles, et souvent chèrement payées !!! La fuite, si peu sexy, est malheureusement le parent pauvre de la self défense.

Je le répète : si notre objectif est de rentrer tranquillement chez soi, se battre est forcément la pire des solutions. Après, quand on n’a plus le choix, on sait faire ce qu’il faut ! Mais après ! J’aime et je base beaucoup mon enseignement sur cette réflexion de Rory Miller qui est une référence de la défense personnelle, notamment aux US : « Mieux vaut éviter que fuir, mieux vaut fuir que désamorcer, mieux vaut désamorcer que se battre et mieux vaut se battre que mourir… ». Nous avons ici les priorités de travail !

Ma réponse à la gestion de la fuite : venir en stage GePA de l’ADAC !

Comment faire quand on est accompagné ?

C’est en effet quand on se trouve en compagnie de personnes fragiles (enfants, personnes âgées ou non initiées à la Défense de rue…) que la gestion de l’avant agression prend encore plus son sens. Savoir éviter un conflit, voire une agression nous permet d’atteindre notre objectif de protection à moindre coût. Nous sommes nombreux à trouver que c’est juste intelligent !

La Gestion de l’avant agression ne demande pas de savoir se battre, mais nécessite un savoir-faire différent. Comment peut-on s’y entraîner ?

Quand je m’entraîne en boxe thaï ou en boxe française, je me bats, je combats. En défense personnelle, je ne me bats jamais : je veux surtout ne pas entrer dans une logique de combat régulier. Je veux mettre rapidement fin à l’agression, ceci avec tous les moyens à ma disposition et en respectant la loi tant que faire se peut..! Si on sait (ou croit savoir!) faire ça, on est d’autant plus crédible à passer pour une « cible dure » auprès d’un agresseur potentiel, ce qui augmente les chances de réussite du désamorçage. Selon moi la gestion de l’avant agression est une partie importante de la défense personnelle et elle ne peut pas faire l’économie de la défense physique. L’inverse devrait absolument être vrai, sinon le système n’est pas complet. Nous ne sommes pas en temps de guerre ! Ceci dit, quand il faut y aller, on fait bien ce qu’il faut, hein !

Pour cette gestion de l’avant agression j’ai mis en place des jeux de mise en situation en fonction de différents critères et qui permet de se rapprocher de la réalité. On y travaille les 5 piliers vus dans le stage, en plus des « gestes de premiers secours de l’agression ». Ainsi, c’est complet.

Mon credo c’est : « Gentil… mais pas trop ! »

En savoir plus

Enseignants, chercheurs, pratiquants, sportifs… intéressés par la self-defense, je vous invite à participer à ce module de formation GePA, il ajoutera une solide corde à votre arc. Il vous suffit de contacter l’ADAC pour organiser un stage dans votre club ! L’ADAC France propose aussi en exclusivité des très bons stages de mise en situation nommés CATS. Ils sont très intéressants et permettent de se confronter à moindre coût à des situations qui peuvent être « tendues ». Vérifiez le calendrier sur le site de l’ADAC France, le CATS est une expérience marquante !

Pour terminer ce petit exposé sur la nécessité d’une bonne gestion de l’avant pour éviter le combat, je m’appuierai, excusez du peu, sur Sun Tzu dans L’Art de la guerre :

« Le meilleur savoir-faire n’est pas de gagner cent victoires dans cent batailles, mais plutôt de vaincre l’ennemi sans combattre. »

Aujourd’hui à défaut de vaincre, continuer à mener une Vie de qualité, c’est bien aussi… CQFD !